photo sharing and upload picture albums photo forums search pictures popular photos photography help login
JM Peers de Nieuwburgh | all galleries >> Galleries >> GIVERNY AUTREFOIS > LA MAISON de Monsieur PICARD "Poule"
previous | next

LA MAISON de Monsieur PICARD "Poule"

Page extraite de l'album GIVERNY AUTREFOIS
_______________________________________

Texte, photographie et mise en page de Jean-Michel Peers
Carte postale de la Terra Foundation for American Art.
Eléments historiques, André Buffet et Guy Colombel
Carte postale "Giverny, Eure", collection Roland Sorin
Merci à la famille Guérin (Le Jardin des Plumes)
pour les photos et les plans.
Merci à Albert Pillon pour son fidèle souvenir des lieux.
Merci à Serge Pirault, chef du "Jardin de Giverny" de 1987 à 2004.
__________________



Au début du siècle, Armand S. Picard, ingénieur-conseil
à Paris, acquiert un grand terrain au sud des Pépinières de Giverny.
La propriété est bordée au nord par la rue du Milieu, au sud, par le chemin du Roy,
à l'est, par la rue des Grands Jardins, à l'ouest, par la rue de la Ferme (Dîme) et
se poursuit au delà de la rue de la Ferme, jusqu'aux "Pilotis" et sous l'église.

L'ingénieur travaillait pour Gustave Eiffel et la Compagnie du Chemin de Fer Métropolitain de Paris.
Entre 1902 et 1933, il publia chez Dunod une douzaine d'ouvrages sur
la législation des brevets d'invention, dont il était spécialiste.

Armand Picard habitait rue Saint Lazare à Paris et prévoyait de construire une belle résidence secondaire
à Giverny. Dix ans plus tôt, à quelques pas de là, Claude Monet mettait en eau son second bassin.


Armand Picard dans son verger, 18 avril 1912

D'origine juive alsacienne, l'ingénieur était sûrement un homme précis et organisé.
En effet, Il avait constitué un album de photos des étapes de la construction de
sa résidence givernoise. Ce précieux recueil s'est transmis, avec d'autres
documents d'époque, entre les propriétaires successifs depuis l'origine.
Le dernier acquéreur nous les a aimablement confiés
pour compléter l'album de "Giverny Autrefois"

Heureux hasard, car, bien que cette grande maison figure en bonne place sur plusieurs
cartes postales du quartier des "Grands Jardins", on ne savait rien sur son origine.
Il faut dire que n'étant pas liée aux peintres qui ont rendu célèbres quelques
belles propriétés, ni aux anciennes fermes, témoins de l'histoire du village,
c'était une belle maison anglo-normande, certes, mais sans plus. Pourtant,
son histoire ne manque pas d'intérêt, vu la qualité de sa construction, son
parc aux essences rares et la personnalité du premier propriétaire.


L'album photos d'Armand Picard





Le quartier des "GRANDS JARDINS", vers l'ouest.

Voici ce que l'on voyait depuis l'emplacement de la future maison; une vue dégagée vers le nord-ouest,
avec la ferme de la Dîme, à gauche, les pépinières, l'église Sainte-Radegonde et le presbytère, au centre,
et le Café Legrand à droite. Si l'on considère l'état des bâtiments de la Ferme de la Dîme, les pépinières
encore jeunes, et l'église, sans l'annexe des Charitons, on peut situer ce paysage autour de 1900.
A notre connaissance, cette photo originale est sans doute la plus ancienne des "Grands Jardins".
Elle précède de peu l'essor des pépinières de Giverny (pépinières Féron) et de plus de 50 ans
les constructions que l'on peut voir de nos jours sur l'ensemble de la surface.



Au sud-est, depuis la propriété, on embrassait la plaine des Ajoux et la "Prairie", le Moulin des Chennevières et, au
fond, la colline surplombant la rive gauche de la Seine. On devine la voie ferrée et son ballast surélevé, car en
zone inondable (vers 1900). Le panorama a peu changé depuis, mais la voie ferrée a laissé place à la route.
______________



ETAPES DE LA CONSTRUCTION DE LA MAISON - Aile Est, 1912 et 1913.































___________________


ONZE MOIS PLUS TARD, en 1913....

La maison est terminée. Bien organisé, l'ingénieur avait laissé un côté aveugle en attente.
En effet, il prévoyait d'ajouter un jour une aile ouest, ce qu'il n'entreprit qu'en 1924, sans
doute retardé par la Première Guerre Mondiale et ses conséquences économiques.









On ne peut qu'admirer le talent de l'architecte, notamment pour les toitures de cette
belle résidence digne de ses soeurs de la côte normande. Sans doute fier du
résultat, Monsieur Picard avait apposé l'initiale de son nom sur le renfort
de toutes les cheminée, comme on le voit toujours ci-dessous.







Cette carte postale du quartier des "Grands Jardins" montre le côté nord de la maison, vu depuis
la rue d'En-Haut. En avant-plan, on voit les pépinières de Giverny. C'était avant
l'agrandissement de 1924 qui a plus que doublé la surface de la maison.

Ci-dessous, peu avant 1924.



Les plantations des pépinières et du bord du ru communal ont grandi.
Les faux colombages s'effacent, le crépi est triste et la maison se voit
affublée de disgracieux bâtiments provisoires, en attendant l'agrandissement.

Ce n'était pas un bon jour pour le photographe, qui avait peut-être commencé sa journée
dans les bistrots de la rue d'En-Haut ce jour-là et avait du mal à stabiliser son trépied.

_________________

L'AGRANDISSEMENT

En 1924, Armand Picard prévoit d'agrandir et d'aménager des dépendances.



Sur le plan, on trouve l'agrandissement substantiel de la maison d'habitation et les aménagements
suivants: "magasins pour charbon etc, bureau, garage, magasin, remise à outils, cour, bâtiment
provisoire". La nouvelle maison d'habitation deviendra ceci...






Comme pour la maison anglo-normande de 1913, on remarque de beaux matériaux de construction
et de belles finitions. Les murs des cuisines et de l'office sont recouverts de carreaux
blancs biseautés identiques à ceux des couloirs et des quais de certaines stations
du métro de Paris. Ceux-ci ont été remplacés, mais les petits carreaux du sol,
sans doute des années 50, ont été conservés pour la grande salle.




La grande verrière et son armature métallique qui relie toute la façade nord au mur extérieur
rappelle les structures des auvents du métro aérien et celles dessinées par Gustave Eiffel.
Un témoignage de la collaboration d'Armand Picard avec le métropolitain et l'illustre ingénieur?



Sur le terrain, on trouve les diverses dépendances et le poulailler de Madame Picard, qui fit
l'objet d'une délibération du conseil municipal en 1925. Il y avait aussi un potager et un verger.
Parisiens la semaine, les Picard avaient engagé Albert Adrien et Marguerite Pillon pour
entretenir la propriété. Le couple a beaucoup contribué à la conservation de ce
grand domaine. Albert Adrien et Marguerite habitaient une petite maison du
"Quartier du Pressoir", l'actuel N°103 de la rue Claude Monet, en face du
"Hameau" et voisine des fermes de la Côte et Duboc.

_________________

POURQUOI "PICARD Poule" ?

Le patronyme "Picard" était bien connu au village avant l'arrivée d'Armand Picard en 1912.
Il y avait notamment Edmond, le laitier et son neveu Charles, le maçon, habitant au "Bout de Giverny".
Ils n'avaient aucun lien de parenté avec Monsieur Armand. Pour identifier facilement le nouvel arrivant,
les givernois avaient coutume d'accoler familièrement le mot "poule" au patronyme de l'ingénieur,
surtout depuis la demande originale que celui-ci fit au maire pour la collection
des chères et précieuses poules de race dont sa femme faisait l'élevage.

Armand Picard avait épousé Alvina Julia Donzelot, d'origine Franc-Comtoise. Elle habitait Paris et travaillait
comme vendeuse chez un fleuriste. C'est l'élégante jeune femme que l'on voit lors de la construction
de la maison, coiffée d'un grand chapeau noir. Une fois installée à Giverny, Mme Picard se prit de
passion pour les poules de collection, qu'elle présentait en concours. La place ne manquait
pas et chaque race de poule avait son propre enclos et abri. Dans la journée, elle laissait
ses poules picorer en liberté sur leur terrain en bout de propriété. Une de ces parcelles
était de l'autre côté de la rue de la Ferme. Il était peu pratique de traverser la rue avec
ses poules le matin pour les mettre au vert, et le soir venu, retraverser pour les rentrer
aux enclos et les protéger des prédateurs. Les poules étaient l'objet de toutes les
attentions. A la veille de chaque concours, Madame Picard et Marguerite lavaient
les cages de transport, nettoyaient les poules et leur lustraient les ailes. Homme
de décision, son ingénieur de mari dessina donc les plans d'un souterrain.

En 1924, il propose au maire de le faire creuser à ses frais. Il y prévoit même
des portes aux entrées pour la sécurité des poules et faciliter leur déplacement!




DELIBERATION DU CONSEIL MUNICIPAL



En février 1925, le conseil municipal donne son accord pour la construction d'un petit tunnel de
1,20m de large, à 2m de profondeur sous l'actuelle rue de la dîme. Le Maire, Alexandre Gens,
fut bien avisé et négocia habilement cette faveur particulière accordée par son conseil.
En échange de quelques m² sous la rue, il demanda à l'ingénieur de céder quelques
m² de son terrain en bordure de rue pour arrondir le virage et faciliter la circulation
des véhicules au carrefour. Voilà une affaire rondement menée.
Après tout, ce n'étaient pas n'importe quelles poules!




De nos jours, on peut encore voir les parapets en béton de chaque côté de la portion de la rue de la Dîme
comprise entre la rue du Milieu et le chemin du Roy, mais le souterrain a été comblé.
___________________

AUJOURD'HUI

En 1959, Après le décès de son mari, Madame Picard vend la maison aux époux Luquet, des amis d'Armand Picard.
Les Luquet habitaient aussi à Paris, où ils étaient traiteurs. Les acquéreurs s'engagent à laisser
à Madame Picard la jouissance des lieux jusquà son décès, qui surviendra en 1972
La famille Luquet s'y installe alors pendant 15 ans, et revend ensuite à Monsieur et Madame Serge Pirault,
restaurateurs. On voit sur le plan d'un bornage de géomètre de 1987 que la propriété n'allait plus que jusqu'à
la rue de la Dîme. La partie du terrain la plus éloignée de la maison fut morcelée ensuite. Il restait cependant
un beau parc de 8000m². Début 1987, après l'aménagement des cuisines et de la salle, la famille Pirault
y installe son restaurant, "Les jardins de Giverny". Ce fut, pendant 17 ans, la bonne table de Giverny. On y
organisait traditionnellement le repas des anciens. Sur cette photo, prise en novembre 2001, on peut voir
le menu, dessiné par André Picard (voir ICI), qui a transmis bon nombre d'anecdotes locales à André Buffet.



Les Pirault cesseront leur activité en 2004 et vendront à Mr et Mme Peter. Après l'ouverture éphémère
d'un nouveau restaurant, les propriétaires abandonnent leur projet et la maison tombe dans l'oubli.




Aujourd'hui, la belle endormie ne demande qu'à se réveiller avec le magnifique parc qui lui fait face.




C'est devenu une réalité depuis le 1er novembre 2012. Après d'importants travaux, Eric Guerin, chef étoilé
de "La Mare aux Oiseaux" en Brière, originaire de notre région, retrouve le terroir de son enfance
avec "Le Jardin des Plumes". Il y a exactement un siècle, Armand Picard
posait la première pierre de cette imposante demeure.
___________________


Retour en Page d'Accueil

POUR NOUS ECRIRE...

Des commentaires? des suggestions, des photos, des témoignages ou anecdotes...?
Merci de nous écrire dans la zone de texte en bas de page. Pour nous permettre de vous répondre,
indiquez vos noms et e-mail. Cochez "private comment", si vous voulez que votre message
ne soit visible que de l'administrateur du site. Pour envoyer, cliquez sur "Add Comment".
Nous prendrons contact avec vous par mail.

© 2010-2024 GIVERNY AUTREFOIS - Reproduction interdite sans accord écrit des auteurs


other sizes: small original auto
Drouin 29-May-2022 16:51
Bonjour, je viens de lire cette fabuleuse histoire du "Jardin des Plumes". Je suis le jardinier de Mr Gallienne et je suis en train d'aménager ce jardin enfin ce petit parc. Pourrions nous échanger sur l'histoire du jardin mais aussi sur la maison d'Edmond le laitier qui actuellement la maison d'hôte "O Plum'Art". Il est important pour moi de comprendre le passé des maisons. Voici mes coordonnées : Pierre-Yves Drouin 06-82-52-63-05 pydrouin@orange.fr
Type your message and click Add Comment
It is best to login or register first but you may post as a guest.
Enter an optional name and contact email address. Name
Name Email
help private comment