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05-MAY-2006

La Chapelle de Ronchamp

Notre-Dame du Haut : Un espace où souffle l'Histoire

Après les combats sur la colline et les bombardements de septembre 1944, les habitants de Ronchamp, attachés au pèlerinage à leur chapelle dédiée à la Vierge Marie, songent à la faire reconstruire - une fois de plus, puisqu'en 1913 la foudre l'avait mise en flammes.
La Commission d’Art sacré du Diocèse de Besançon est partie prenante ; mais dans la mouvance de la réflexion fondamentale sur l’art sacré après-guerre, menée par des personnalités telles que les Pères dominicains Couturier et Régamey, elle écarte la simple restauration de la chapelle néo-gothique qui a pourtant l'affection des Ronchampois.

Le Corbusier, non sans débats, est l’architecte qui semble s'imposer, non seulement pour ses formes architecturales exigentes et pures, tournées vers le présent mais pour son sens de l'humain et son instinct du sacré ; mais il passe à l'époque pour un urbaniste utopique, voire un illuminé. Est-il pensable qu'un agnostique de tradition protestante et, qui plus est, a travaillé pour Moscou, construise un sanctuaire marial ? D'ailleurs Le Corbusier n'aime guère les curés, et suite à une mauvaise expérience sur le projet de la basilique de la Sainte-Baume à Marseille, il a exprimé son refus catégorique d'oeuvrer désormais pour une institution morte. Cependant François Mathey et le Chanoine Lucien Ledeur, tous deux ronchampois, liés d'amitié et membres de la Commission d’Art sacré, parviennent à le convaincre, après plusieurs péripéties. Maurice Jardot, collègue de Mathey aux Monuments Historiques et son ancien condisciple au lycée de Belfort sert d'intermédiaire auprès du Maître.

Mais il faut souligner dans le miracle de l'accord spirituel entre l'architecture et la liturgie, la place des entretiens qu'a eu Lucien Ledeur avec l'architecte à son atelier de la rue de Sèvres, pendant six mois au cours desquels Le Corbusier a pu appréhender le culte de la Vierge Marie, sa grâce et sa splendeur et son mystère douloureux ; découvrir aussi l'humilité qui n'est pas un vain mot de fausse piété mais ce qui conduit l'artiste au-delà de lui-même dans sa création.

Puis l'architecte, venu sur le site, est séduit par son ouverture géographique, son passé historique chargé et la présence la plus ancienne d'un sanctuaire : cette colline veille sur la route qui va de l'est à l'ouest, elle est comme un relais qui regarde en droite ligne vers sa ville natale de La Chaux-de-Fonds.

Une Société civile immobilière va s'activer à rassembler les fonds nécessaires à la construction ; un industriel local, Alfred Canet, s'emploie à cette tâche.
Mais il faut encore persuader la hiérarchie catholique du bien fondé d'une pareille architecture atypique, qu'une première maquette révèle en 1950 ; le projet est ardemment défendu auprès du Diocèse, par les abbés Lucien Ledeur et Marcel Ferry et l'évêque lui-même, Monseigneur Dubourg, s'engage personnellement à le soutenir. Mais il faut faire vite : réticences sur place, réactions hostiles des bien-pensants, pétitions à Rome, autant d'entraves pour stopper le chantier.

A la manière de l’équipage d’un navire, terrassiers et maçons font corps avec le bâtiment qu'ils construisent ; quelques entreprises locales collaborent efficacement et Maisonnier, détaché de l’agence de Le Corbusier, Bona, ses ouvriers et le grand architecte lui-même ne comptent par leur temps. La première pierre est bénie en avril 1954 par Monseigneur Béjot et l'Abri du Pèlerin inauguré, en présence du préfet à qui on en fera le reproche. Le 25 juin 1955 enfin, Le Corbusier remet solennellement Notre- Dame du Haut à l’Archevêque de Besançon :

"Excellence,
En bâtissant cette chapelle, j’ai voulu créer un lieu de silence, de prière, de paix, de joie intérieure. Le sentiment du sacré anima notre effort. Des choses sont sacrées, d’autres ne le sont pas, qu’elles soient religieuses ou non. (...) Quelques signes dispersés, et quelques mots écrits, disent la louange à la Vierge. La croix – la croix vraie du supplice – est installée dans cette arche ; le drame chrétien a désormais pris possession du lieu. Excellence, je vous remets cette chapelle de béton loyal, pétrie de témérité peut-être, de courage certainement, avec l’espoir qu’elle trouvera en vous comme en ceux qui monteront sur la colline, un écho à ce que nous y avons inscrit."


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