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PUIS ELLE REVINT AU BORD . . .

Ça ne pouvait plus attendre. Pendant qu’elle se débattait sous la surface, je brisai une longue branche de saule et, à genoux,
je m’approchai tranquillement du centre de l’univers.
(Dramatisation poétique direz-vous! Mais le centre de l’univers ne se trouve-t-il pas à l'endroit même où la vie s’éteint ?)
Enfin bref, bien que la peur ne m’habitait pas vraiment en cours d’intervention, de voir l’eau, de par mon poids, déborder du trou et me rejoindre,
je me questionnai une fraction de seconde sur la pertinence de ma témérité, mais sans plus.
Voyant l'eau débordée, je m’étendis de tout mon long sur la glace afin de répartir mon poids et me mis à ramper vers le trou.
La biche qui réussit à refaire surface un moment, probablement effrayée par ma proximité, s’agita et disparut à nouveau,
mais cette fois-ci pas seulement sous l’eau, mais aussi en partie sous la glace.
Il y a urgence. À plat-ventre plongeant mon bras sous l’eau en farfouillant, j’eus tout juste le temps de la saisir par une oreille puis l’agripper par le cou
avant qu’elle ne disparaisse à nouveau sous l'eau, voir même sous la glace. Une fois la tête hors de l’eau et les pattes avant accrochées au rebord,
comme elle se débattait vivement, cela me permit, en roulant sur moi-même, de la tirer complètement hors de l’eau en la basculant par-dessus moi
comme l'aurait fait un lutteur ou un judoka. Dès qu’elle fut totalement hors de l’eau, ce fut le calme plat.
- Déjà que la glace où nous nous trouvions s’était enfoncée d’un pouce ou deux, valait mieux se calmer le pompon et rester immobile. -

Sauvée des eaux, mais pas de tout danger, je lâchai la biche immédiatement pour qu’elle puisse s’enfuir loin de moi et du trou dont la périphérie
devenait de plus en plus gourmande. Une fois la biche partie, il ne m’aurait suffi, après avoir repris mon souffle, que de rouler sur moi-même jusqu’à la rive.

Mais voilà… Elle n’en fit rien. Elle resta là, silencieuse et quasi « catatonique », la tête tournée vers moi me fixant avec ses grands yeux lustrés comme des perles noires
cherchant son souffle tout comme moi au travers de frissons et de spasmes prolongés. Nous étions tous deux couchés sur la glace côte à côte
comme deux phoques hébétés sur une banquise incertaine (Banquise 2.0 des années 2000). Sauf que moi j’étais celui près du gouffre qui toussait
à s’en cracher les poumons! À ce moment, épuisé, étourdi et nauséeux, le cœur me débattait si fort et ma vision était si assombrie et constellée que,
sans mentir, je crûs un instant que j'allais m'évanouir.

Mais une fois encore, face à cette scène, à ce regard déchirant, l'inquiétude disparut et le surmoi l'emporta. Tous deux allongés en cuillère,
moi et cette biche qui, le cou tordu pour me regarder, toute raidie, transie, les pattes avant recroquevillées sur elles-mêmes et saignant légèrement,
les pattes arrières droites et raides comme des piquets d’acier, le poil imbibé d’eau glacée qui se givrait au contact de l’air et lui verglassait les
moustaches et les oreilles, et ces spasmes respiratoires provoqués par l’épuisement et l’hypothermie qui, tantôt lui courbait le dos vers l’intérieur,
tantôt vers l’extérieur et du même coup me frappait au ventre; oui, cette scène-là me faisait m’oublier totalement.

De la voir ainsi, persistant à se tourner la tête vers moi en me fixant du regard comme pour me signifier son approbation à poursuivre ce sauvetage,
j’ai crû un moment qu’elle allait me parler.
Qui sait ? Songeait-elle à me dire : Que faisons-nous maintenant ? Est-ce que ce sera encore bien long ? T'attend quoi là…?

Bref, sans plus attendre je la repoussai avec mes bras le plus loin possible puis encore plus loin avec mes pieds pour qu’elle comprenne qu’elle était maintenant
libre de partir, du moins que je souhaitais qu’elle s’éloigne. Mais elle n’en fit rien. Elle demeura sur place, immobile et coite, la tête constamment tournée
vers moi comme attendant la suite des choses. Je roulai alors sur moi-même vers elle pour la pousser à nouveau à quelques reprises avant de me dresser sur
les genoux pour l’agripper et l’entraîner plus loin. La tenant tant bien que mal dans mes bras, je me pressai de retourner sur la rive en empruntant un parcours
différent ayant déjà fragilisé la glace auparavant.


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Gervan22-Dec-2007 21:53
Beautiful report of and extreme adventure. V.
BleuEvanescence03-Sep-2007 17:04
j'en ai moi-même le souffle coupé...
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