TEXTE INTEGRAL DU FILM
HOME est un film documentaire écrit et réalisé
par
Yann Arthus-Bertrand
Les engrais enfin. Ils ont encore issus de l’industrie pétrolière. Ils
apportent une fertilité inespérée à n’importe quelle parcelle
délaissée par les hommes. Les espèces adaptées au sol et au climat
laissent la place aux espèces les plus productives, les plus faciles à
transporter. C’est ainsi qu’en un siècle, les trois-quarts des variétés
que l'homme avait sélectionnées pendant des millénaires ont
disparu. A perte de vue, engrais dessous, plastiques dessus, les
serres du désert d'Almeria sont le potager de l'Europe. Une ville de
légumes bien calibrée attend chaque jour les centaines de camions
qui vont les porter dans les supermarchés.
Plus un pays se développe, plus ses habitants consomment de la
viande. Comment satisfaire une demande croissante dans le monde
sans concevoir des élevages de bovins quasi concentrationnaires ?
Tout s’accélère : fabriquer de la viande plus vite que l’animal est
devenu une routine quotidienne. Dans l’immensité de ces corrals
piétinés par des millions de bêtes, pas une herbe ne pousse. Une
noria de camions venant de tous les horizons du pays apportent des
tonnes de céréales, soja et granulés hyperconcentrés qui se
transformeront en tonnes de viande.
Bilan : Il faut cent litres d'eau
pour produire un kilo de pomme de terre, quatre mille pour un kg
de riz, treize mille pour un kg de boeuf, sans compter le pétrole
pour sa production et son transport. Notre agriculture est devenue
une agriculture pétrolière. Elle nous a permis de nourrir deux fois
plus d'être humains sur la terre. Mais elle a remplacé la diversité
par la standardisation. Elle a permis d'offrir à beaucoup d'entre
nous un confort inespéré. Mais elle rend notre mode de vie
totalement dépendant du pétrole.
Voici la nouvelle mesure de notre temps. L’horloge de notre
montre bat désormais au rythme de ces mécaniques infatigables
posées sur la poche de soleil.
La planète entière écoute ce
murmure qui berce nos espérances et nos illusions.
Elles prolifèrent avec nos besoins, nos désirs toujours insatiables et nos
gaspillages. Nous savons que la fin due ce pétrole bon marché
s'annonce, mais nous ne voulons pas le croire.
Pour beaucoup d’entre nous, le rêve américain s’incarne dans le
nom d’une cité emblématique, Los Angeles. Dans cette ville qui
s’étire sur plus de cent kilomètres, le nombre des voitures est quasi
égal au nombre d’habitants. Chaque nuit s’y joue la fantastique
parade de l’énergie. Les jours ne semblent plus être qu’un pâle
reflet de ces nuits qui font de la ville un ciel étoilé.