Lundi 19 Août au Lundi 26 Août 1963 – Archéologie appliquée au Poeymau. Laplace.
Seul
Véhicule : 500 RGST
Sans doute à l’initiative de Loulou qui connaissait « bien » Laplace,
archéologue au CNRS, ce dernier me contacta pour entreprendre le dégagement
de son site de fouilles abandonné depuis 20 ans, la grotte de l’Escargottière,
au Poeymau. Nous y fîmes une incursion afin qu’il me précise ce qu’il
attendait de moi, en compagnie de son féroce chien berger berbère qui
n’eut de cesse de vouloir me bouffer, malgré sa muselière. Pour renforcer
nos liens d’amitié je lui administrais régulièrementt des coups de
pied dans les couilles dès que Laplace avait le dos tourné. Nous ne
nous sommes jamais réconciliés, le chien et moi. Plus tard cet horrible
cabot a failli dévorer la nouvelle femme de Laplace, c’est dire…
Tel maître, tel chien. Laplace était un parano qui haïssait le monde
entier. Il m’abreuvait de toutes sortes d’histoires abracadabrantesques
pendant le trajet en voiture, avec le chien qui grondait de fureur
sur le siège arrière, les yeux injectés de sang (j’avais dû lui prendre
sa place). Ambiance. Je n’ai accepté le travail (rémunéré au noir)
que lorsque Laplace me précisa que je travaillerai seul, donc sans son
fauve de merde, mon premier souci dans l’immédiat. Dommage car j’aurais
pu intégrer des rudiments d’archéologie version paléontologie. Chose
à laquelle il ne tenait pas du tout, mais pas du tout. Lorsque je
lui ai dit naïvement que le travail d’archéologue serait passionnant
pour moi et que j’aimerais orienter mes études dans ce sens il s’est
fermé comme une huitre en colère, puis argumenta. Ouh la la mais tu ne
te rends pas compte, il te faudra un diplôme de géologue, puis de
stratigraphie, d’histoire préhistorique, de météorologie à travers
les âges et que sais-je encore, il n’arrêtait pas d’énumérer les
qualifications requises pour exercer cette profession réservée à
l’élite de l’élite… Décourageant. Trop jeune et mal informé j’ignorais
tout du « marché » de l’archéologie, surtout l’archéologie locale.
Pour Laplace un nouveau concurrent se pointait à l’horizon, et ça
pas question (il était déjà en concurrence avec une femme archéologue
d’Orthez, Marsan). Gros con, il aurait pu me former, lui qui n’a pas
d’enfant. Se croit-il immortel ? Toujours est-il que j’ai abandonné
l’idée et continué mes études de physique à la fac de Pau avec un
autre fou, Lafargue. Lequel a manqué de justesse de me dégoûter des
sciences. La vie n’est pas un long fleuve tranquille, quel est l’imbécile
qui a dit que ça l’était ?
Quid du travail demandé par Laplace ? Simple et plutôt physique.
Débroussailler tout d’abord. Puis dégager le site de fouilles à moitié
effondré des blocs et de la terre accumulés dans une tranchée plutôt
profonde (7 mètres) et volumineuse, en faisant bien attention aux
« foyers » que l’on pouvait voir sur les parois de la tranchée,
caractérisés par le charbon de bois résiduel. Mettre de côté os,
dents et autres restes présentant un intérêt archéologique… partie
la plus intéressante bien sûr, car j’ai ainsi appris que des rhinocéros
laineux, des tigres et autres ours des cavernes gambadaient par
ici dans les temps jadis.
Page 367 du Carnet II
Lundi et mardi 19 et 20 Août 1963 – Equipement du Poueymau
Participants : Laplace et Jean, le clebs en colère.
Véhicule : voiture de Laplace
Du matériel est monté à l’Escargottière : brouette, pelle, pioche, rateau etc…
Jeudi 22 Août 1963 – Travail archéologique au Poueymau
Seul
Véhicule : 500cc RGST
Je passe la journée au Poueymau par un temps splendide. Travail
de terrassier qui me change de mes cours particuliers et n’est pas
pour me déplaire. Je dégage un fort volume de blocs et débroussaille
largement l’accès à la grotte.
Vendredi 23 Août 1963 – Travail archéologique au Poueymau
Seul
Véhicule : 500cc RGST
Je n’y passe que l’après-midi, mais je compte la journée pour le
père Laplace car je bosse pas mal d’heures et il ne me paie pas
mes frais de déplacement.
Vendredi 26 Août 1963 – Travail au Poueymau
Seul
Véhicule : 500cc RGST
Je n’y passe que l’après-midi également, mais je compte la journée
pour le père Laplace car je bosse pas mal d’heures et il ne me paie
pas mes frais de déplacement. Pluie.
Autres déplacements au Poueymau et activités : cf. le carnet de comptes 1963.
Le matin est consacré à la visite de Laplace au Poueymau pour que
je rende compte de mes travaux de cet été. Il est assez satisfait,
quoique toujours râleur. Ah ces foyers qui ont été sectionnés et
les éléments dispersés etc…. Mais il ne me propose pas de venir
fouiller avec lui. Y est-il retourné au moins ? Rien n’est moins
sûr. Il avait sans doute un contrat d’aide patronné par le CNRS et
devait donner des justificatifs Cette Escargottière n’était qu’un
prétexte. Il y avait réalisé son travail de thèse de doctorat, trouvé
des indices d’une ethnie particulière à la vallée d’Ossau etc.
Le filon était épuisé. Toujours magouille et compagnie… et le pauv’
con de service, l’idiot utile complice malgré lui de ces magouilles