photo sharing and upload picture albums photo forums search pictures popular photos photography help login
Jean M. Ollivier | all galleries >> Scraps et souvenirs >> Secret pin's >> Dans le secret des Ollivier >> Compilé des meilleurs écrits et récits >> 13personnes >> 13ajmo > Juillet 1952 -Spectacle de Marionnettes à Eaux-Bonnes par Robert Bourneuf et Loulou
previous | next
22-Aug-2025 récit jmo

Juillet 1952 -Spectacle de Marionnettes à Eaux-Bonnes par Robert Bourneuf et Loulou

Photo : marionnette à fil de Pinocchio

Les marionnettes au casino des Eaux-Bonnes

C’était au début des années cinquante. Ma tante Loulou et son copain
Robert Bourneuf, avec lequel elle vivait maritalement quitte à être la
honte de la famille, organisaient des représentations de marionnettes aux
quatre coins du monde ou presque, en Afrique notamment. Afin de financer
le voyage dans le Sud-Ouest décidé par Loulou pour rendre visite à sa famille
(la mort d’Alexandre son père peut-être, en 1952) le père Bourneuf
s’arrangea avec le casino des Eaux-Bonnes pour qu’il puisse y présenter
son spectacle de marionnettes.
Nous, les neveux et nièces de Loulou n’avions jamais eu droit à la
moindre séance privée et étions assez ignorants de la science des marionnettes.
Mais là, occasion inespérée, nous pourrions assister à une représentation
publique et admirer selon Loulou les performances de son petit copain
l’artiste, et voir enfin en action ses fameuses marionnettes dont nous
parlions souvent sans les avoir jamais vues, car enfermées à clé dans un
coffre mystérieux qui ne quittait jamais le marionnetiste. Ma sœur
Christine et moi-même étions donc invités à assister au prochain spectacle.
Youpie !! Car en plus, ce pauvre marionnetiste ne possédant pas de
voiture, nous devrons prendre le train pour gagner Laruns (voilà un
progrès par rapport au voyage de Bielle effectué deux ans auparavant
avec Mam (voir ). De Laruns et par l’ancienne petite route au bord
de laquelle nous nous restaurons aujourd’hui en 1966, il fallait que
Loulou et son artiste montent aux Eaux-Bonnes à pied, en tirant une
petite charrette chargée du coffre magique rempli de marionnettes,
le délicat outil de travail de « l’oncle Robert », titre que la famille
lui récusait obstinément. Et pourtant j’ai eu l’impression qu’il aurait
apprécié. Il faisait des efforts pour apprivoiser ses « neveux et nièces ».
Il y avait bien pire parmi les oncles légitimes. Celui-ci était toujours
bien habillé, parlait sans hausser la voix, savait dessiner et se montrait
gentil, voire attentionné. Nous étions charmés.
Ces deux adultes, une charrette, et deux mioches à la traîne sur une
petite route oubliée et déserte, un vrai tableau digne des Misérables
et que Zola n’aurait pas désavoué. Nous ne nous rendions pas compte, tout
mioches que nous étions, de la dureté du travail d’un artiste indépendant,
ne devant compter que sur lui-même et sur son art considéré comme mineur,
méprisé par la bonne société dont je faisais partie sans le savoir. C’était
tout simplement une grande personne qui faisait son travail. On ne nous
demandait même pas de l’aimer, pire, il fallait s’en méfier car on nous
sussurait qu’il aimait peut-être les petits enfants, lui. Nous ne comprenions
pas cette équation. Et pourtant, nous les enfants, pensions qu’il méritait
d’être aimé car nous aprécions sa présence, sa part de mystère, le considérant
plus comme une sorte de père spécial que comme un oncle sorti de nulle part.
Curieux paradoxe pour les enfants qui l’aimaient bien comme on dit, mais
il était sous-entendu qu’il ne fallait pas l’aimer.
Spectacle « en matinée » donc, c’est à dire en début d’après-midi, dans
une des salles de l’opulent casino des Eaux-Bonnes, encore fréquenté à
cette époque par une bourgeoisie cossue. Robert doit tout faire par lui-même,
déballer les marionnettes, les défroisser, monter la petite scène, tester
la sono et entamer une courte répétition pour délier ses poignets et poser
sa voix pour être sûr de faire parler ou crier correctement les différents
héros de ses histoires. Un homme orchestre en somme. Et pour les enfants
c’était quelqu’un qui n’allait pas s’enfermer dans un « bureau » mystérieux
qu’ils ne voyaient jamais dans lequel il prétendait « travailler ». L’oncle
Robert, lui, ne cachait pas ce qu’il faisait, bien au contraire.
Installés au premier rang d’une salle bien peu remplie, nous fûmes ainsi
aux premières loges pour apprécier la performance de l’oncle Robert. Loulou
vint faire une révérence et annonça le programme, tout sourire. Elle nous
étonnait, Loulou, nous ne nous attendions pas à la voir effectuer une telle
prestation en public, avec une aisance très professionnelle. A côté d’elle
nos autres tantes nous semblèrent tout d’un coup devenues de vieilles rombières
d’un autre âge, ne sachant rien faire de leurs dix doigts, et promptes à
nous engueuler pour des broutilles. Je n’ai pas le souvenir d’une enguelade
de Loulou. Elle réservait ça à ses frères et sœurs.
Je n’ai aucun souvenir des thèmes présentés dans ce petit théâtre
marionnettes. Je revois virevolter des petits personnages ressemblant
à des papillons multicolores pourvus d’une voix mystérieuse cachée derrière
un épais rideau. Spectacle envoûtant pour les enfants qui savent transposer
dans leur tête grâce à leur imagination fertile le monde suggéré par les
marionnettes et ainsi continuer de voyager en esprit dans leur monde
merveilleux, bien après que le spectacle soit terminé.
Il est donc dur de retourner sur terre lorsque le père Bourneuf,
saisi d’un brusque accès d’humeur, se met à lever la voix pour nous
signifier que nous allons rater le train du retour et qu’il n’a pas
de quoi payer l’hôtel, raison pour laquelle, aussi, il a abrégé le
spectacle et accéléré les dernières scènes.
Marionnettes et petit théâtre sont fourrés en vrac et en toute hâte
dans la cariole et c’est la fuite en courant sur la petite route emprunté
à l’aller. J’ai le vague souvenir que nous sommes arrivés en avance pour
prendre le train du soir, la sueur en prime et l’estomac vide. Dur dur
le métier de comédien… et de ses contraintes.

Apple iPhone 13 Pro Max
1/60s f/1.5 at 5.7mm iso320 hide exif
Full EXIF Info
Date/Time22-Aug-2025 19:22:10
MakeApple
ModeliPhone 13 Pro Max
Flash UsedNo
Focal Length5.7 mm
Exposure Time1/60 sec
Aperturef/1.5
ISO Equivalent320
Exposure Bias0.00
White Balance0
Metering Modematrix (5)
JPEG Quality
Exposure Programprogram (2)
Focus Distance

other sizes: small medium large original auto
comment | share