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Foufouland : Marie François Vincent Philibert Edouard Cécile Catherine ...

PRISONNIERS DU FOUFOULAND

Ces joyeux évènements se sont déroulés du Mardi 26 au Samedi 30 Décembre 1961.
L’objectif était de faire l’Ossau en hiver.
Les engins mécaniques étaient-ils ligués contre nous ?
Le charme du Foufouland s'est-il substitué à celui de nos montagnes ?


Noël s’était passé cette année-là exceptionnellement hors de chez moi, de ma famille. J’en avais trouvé une autre en quelque sorte, les adorables Fougère.
Leur demeure était sise au fond d’un long chemin tortueux et cahoteux, dans les riants coteaux bordant la Vallée Heureuse (ça ne s'invente pas), près de Pau. Et cet endroit nous l’appelions le Foufouland. Nous l’avons aimé dès que nous l’avons rencontré, lui, son chalet de bois et ses délicieux habitants. Nous : Hervé et moi, la cordée de choc, à laquelle se joint maintenant l’aîné des enfants Fougère, François, pas encore 19 ans. Il nous paraît bien jeune à nous les vieux de 20 ans !

Préparée depuis pas mal de temps déjà (au moins 15 jours – trois semaines ! une éternité à l’échelle de notre jeunesse), cette expédition nous en avions fignolée tous les détails le 25 décembre, à Noël, fêté au cours d’une très sympathique «fondue» au Foufouland, dans cette toujours extraordinaire ambiance qui nous transportait au ciel. Cela nous mena, naturellement, et comme à l’accoutumée, à plus de deux heures du matin. Mais qu’importe. Ce n’est pas tous les jours Noël, ce n’est pas tous les jours que l’on est heureux et que l’on peut oublier dans la franche et fraîche gaieté d’une famille, une vraie. Moments fugaces et pourtant moments d’éternité.
Donc, le lendemain nous sommes fin prêts et réunis chez François sur les coteaux à 6 heures de l’après-midi (!). Cette fois nous avons mis les moyens : en lieu et place des rustiques (mais fidèles) vélos nous avons à notre disposition une moto (Mahaut) pour Hervé et une Mobylette pour François. Mon ami Patrick m’aurait bien prêté sa moto, mais faute d’avoir pu passer le permis à temps, impossible de l'utiliser. Il fait beau et doux. Et pendant que François prend un peu d’avance avec sa lente Mobylette, nous goûtons, Hervé et moi, quelques derniers et délicieux instants, à chaque instant renouvelés, en compagnie de l’adorable famille et ses adorables filles, les trois «grâces» Marie, Catherine et Cécile.
Puis, en avant. Filons rapidement, arrachons-nous à ces délices émollients dignes de Capoue. Tout se passe normalement jusqu’au bas du Petit Moure (premier relief significatif sur la route d’Arudy). A cet endroit le câble d’embrayage de Mahaut se rompt. Encore une panne ! Comme si cela ne suffisait pas, la chaîne de la moto a sauté ! Hervé veut revenir à Rébénacq, village que nous venons de traverser. Nous faisons demi-tour et nous acheminons en roue libre (ah ! pour être libre, elle est libre ! !) vers Rébénacq. Mais je pense que cela risque de ne servir à rien, les garages étant denrée rare dans ce pays, et vu l’heure …! Nous essayons de remettre la chaîne à la lueur vacillante d’une bougie (qu’ai-je dit plus haut ? Nous étions fin prêts et équipés ?), lorsqu’une camionnette s’arrête et qu’un type d’apparence sympathique vient nous aider avec une énorme boîte à outils (lui aussi doit être un habitué des pannes !). C’est un Ossalois, qui en a beaucoup vu, et qui pourtant s’affole quand nous lui annonçons notre intention d’aller à l’Ossau.
Faisant notre deuil de l’embrayage, nous repartons en première vitesse en direction d’Arudy. La moto est vaillante. Il est même possible de changer de vitesse ! A Sévignacq (Au Soum me reposi), l’on aborde la vallée d’Ossau proprement dite, ses montagnes, son climat. A ce propos, un grand vent la traverse. Debout sur la moto je domine la situation, au-dessus d’Hervé courbé sur le destrier pétaradant. Et chance ! A Izeste, le petit garage du Pont est toujours ouvert, et l’on peut réparer assez rapidement le câble déficient. L’aventure peut continuer. Nous forçons la vitesse autant que faire se peut pour tenter de rattraper François. Du côté de Monplaisir, quelques km avant Laruns, nous croisons des Mobylettes et il me semble reconnaître le bruit familier de celle de François. Illusion, me dis-je, que ferait-il dans ce sens ? Je n'en touche mot à Hervé, qui semble n’avoir rien remarqué.
La moto commence à fatiguer et peine sur la route du Pourtalet. Même en première il faut l’aider, ce qui est assez fatigant. Elle tousse. Cela provient probablement de son carburateur, qui semble dévissé. Mais Hervé ne veut pas s’en occuper. Au-dessus de Caillou de Socques la route devient brusquement verglacée et ça dérape. Il est tombé beaucoup de neige depuis notre dernière visite, quelques jours auparavant. La moto a tellement de mal à avancer qu’Hervé continue seul. Je poursuis à pied, sous le ciel étoilé et sévère, dans un froid mordant. Les vagissements de Mahaut s’estompent dans le lointain, seulement perturbé par le maigre faisceau de son phare. Sac au dos (celui de François), je fais ainsi plusieurs kilomètres. Le temps a passé. Il est maintenant 11h et demi. Les sommets neigeux environnants paraissent froids, distants, inquiétants, presque hostiles même. La route est très glissante.
Aux environs d’Aneou, Hervé me rejoint à pied, catastrophé : pas de François ! ! Nous fouillons partout, montons au col du Pourtalet, désert, explorons le bitume, examinons les fossés, les ravins, rien ! ! Nous appelons, toujours rien ! Pas de Mobylette, pas de François. Il n’est donc pas monté au refuge de Pombie. Nous en tirons vite les conclusions : il faut redescendre, le trouver !
La lune s’est levée et éclaire par moments les crêtes enneigées. Cette lumière parcimonieuse et vacillante change totalement le paysage qui nous est d’ordinaire familier. Quelques nuages s’effilochent sur les sommets. Le moral baisse.
Nous entamons le retour. La route demande une attention extrême. Les sacs lourds déséquilibrent l’engin qui nous porte, et nous frôlons la chute à plusieurs reprises. Après Fabrèges cela nous semble bon, on ne voit plus rien sur la route. Normal puisque nous allons plus vite et que -surtout- le phare de Mahaut s’éteint périodiquement, pour notre plus grand confort, vous pouvez vous en douter. Nous écarquillons les yeux, tels des chouettes. Mais ça ne suffit pas. Au virage de l’entrée de Gabas nous nous retrouvons par terre sans avoir eu le temps de dire ouf ! Traître verglas ! Dans une gerbe d’étincelles nous nous immobilisons. Tout est désert et silencieux. Nous sommes à proximité d’une cabane en bois, adossée à une ruine. Rien ne bouge.
Inutile de dire que nous redoublons d’attention sur la moto qui a daigné repartir.
A tout hasard nous allons inspecter le rocher d’Arudy, côté Fonderie. Nous appelons, fouillons partout pour retrouver la Mobylette. Rien. Très inquiets, nous continuons vers Pau. Las ! Panne d’essence à Sévignacq. Il ne manquait plus que ça à l’inventaire, à une heure et demi du matin en plus ! La route descend presque tout le temps jusqu’à Rébénacq. Là, la moto daigne tousser et les dernières gouttes d’essence nous permettent d’atteindre Gan, à environ sept kilomètres. Tout est fermé, évidemment. Nous tentons d’arrêter un camion, qui n’y consent point. Sans trop réfléchir nous poussons Mahaut vers Pau. Au bout d’un moment je rappelle à Hervé que ça ne sert à rien, qu’il faut aller chez François. C’est prioritaire. Je lui suggère de «piquer» de l’essence. Il n’est pas d’accord. Sur la place de Gan, je renouvelle ma proposition devant une 2CV en stationnement. Nous connaissons bien ces voitures : le capot est facile à ouvrir et la pompe à essence disponible ! A trois heures du matin, quel risque ? Mais Hervé hésite, réfléchit : et si on laissait la moto ici jusqu’à demain ? Et si on regagnait le chalet des Fougère en coupant à travers champs ? Mais les sacs, mon vieux argumentè-je ? Trois sacs énormes pour deux. Et d’ailleurs nous sommes demain ! Allez hop ! Finalement Hervé cède, s’assoit sur ses scrupules et sa bonne conscience et collabore au larcin. Mais quoi ? On sait bien que les « deux pattes » consomment un peu plus en hiver que diable ! Je sors la gamelle et un car, range toutes les affaires de façon à pourvoir partir le plus vite possible en cas d’imprévu et nous soulevons le capot doucement. Un vélo passe. Je tiens le capot ouvert et Hervé pompe énergiquement le précieux liquide en s’éclairant à la frontale. Soudain ô surprise, j’aperçois un piéton qui s’approche de nous et passe à quelques mètres. Mais ils ne peuvent donc pas dormir dans ce sacré bled ! Instant d’affolement, car avec notre chance cette nuit, ce pourrait être le propriétaire de la voiture qui aurait oublié ses cigarettes. En tous cas il ne porte pas d’uniforme. Ce n’est pas un flic. Et d’ailleurs il poursuit sa route sans avoir l’air de s’inquiéter outre mesure. Il est vrai que nous pompons l’essence comme si nous l’avions fait toute notre vie, comme si cela allait de soi à plus de trois heures du matin. Hervé est tellement occupé et concentré sur sa besogne qu’il ne s’est aperçu de rien, et ne me croit pas quand je lui raconte ce que je viens de voir. Bah ! Même si ce type avait eu un doute, aurait-il eu le courage ? Nous n’avons tout de même pas l’air de minables, Hervé et moi !
Nous gagnons allégro le haut des coteaux et trouvons vite l’embranchement désiré. Bientôt nous déposons la moto au départ du chemin Fou-Fou (c’est à 700 m du chalet, surtout pas de bruit !). Sacs au dos nous continuons à pied. Nous les déposons au pied du cèdre qui orne une petite place au pied de la maison, et allons voir sur la pointe des pieds si François est là. Tout est bouclé, sauf sa chambre ! Mais non, il n’est pas là, il n’y a point ses affaires ni sa Mobylette. Pourtant il nous semble bien qu’il y a quelqu’un dans son lit. Le chalet est petit, les chambres exigües, et dès qu’une place se libère on l’utilise.
Inquiets, mais résignés pour un temps, celui de se reposer un peu, nous allons nous coucher sous l’arbre, au clair de lune. Il est quatre heures du matin. La douce lumière lunaire enveloppe ce paysage harmonieux de collines, qui contraste bigrement avec celui des monts affreux couverts de glace où nous exécutions nos figures improbables au guidon de la moto. Nous sommes bien ici. Ce petit coin de paradis nous a récupérés. Nous sortons les provisions : 15 heures que nous n’avons mangé, neuf heures que nous avons quitté le Foufouland, et après une brève collation, nous nous endormons, mais pas tout à fait du sommeil du juste.
Il fait grand jour quand je suis réveillé par la 2CV qui descend le chemin. Très inquiet, je la vois s'arrêter après quelques hésitations. Il est vrai qu’ils sont tout ahuris de nous trouver là ! Ils étaient pourtant sûrs, hier soir, que nous avions dépassé ce point ! "Ils", ce sont Mr et Mme Fougère et Marie leur fille aînée. Nous leur annonçons la catastrophe, mais ils ne s'émeuvent pas outre mesure. Ils poursuivent leur route sans plus attendre, pressés qu'ils sont. Vers 10h1/2 la marmaille (tous les petits frères et sœur de François : Philibert, Edouard, Nicolas, Claire et Odile, le plus âgé a treize ans) déboule et nous prend d'assaut. Il fait un soleil radieux et une douce température. Les enfants font main basse sur les friandises et nous avons grand mal à stopper leur ardeur.
Vers midi, Hervé part seul à la recherche de François. Je reste mollement étendu au soleil généreux, tous les enfants autour de moi, sur moi. C'est bien agréable. A midi et quart François arrive. Ouf ! Et ceci quelques minutes avant ses parents. Nous mettons rapidement les choses au clair : à Laruns, ne nous voyant pas venir, il a rebroussé chemin (ils risquent plus la panne que moi, pensait-il justement) et nous a croisés vers Monplaisir. Il nous a reconnus et s'est mis en devoir de nous rattraper. La Mobylette n'en pouvant plus, n'arrivant pas à monter plus loin que Gabas, il a décidé de bivouaquer dans une cabane en planche, justement dans le virage où nous avions chuté ! Il dit avoir bien dormi. Certes ! Avec le boucan que nous avons fait, c'est bien un test de sommeil profond !
Tout cela est bien bon, mais maintenant c'est Hervé qui court les routes. En attendant nous allons manger dans la salle de séjour du chalet, inondée de lumière. Pour une fois je suis à côté de Marie alors que c'est toujours à Hervé que l'on laisse cette place de choix, en face de Mme Fougère, Denyse, et à côté de François ; d'habitude (déjà !) je suis placé entre François et Cécile, toujours en face de Denyse. Il faut remarquer qu'aujourd'hui la mère et sa fille Marie sont tout à fait charmantes, de retour du coiffeur où elles sont allées ce matin. La raison de leur impatience, au cèdre. Les cheveux blonds de Marie, en accord parfait avec ses beaux yeux bleus, ont acquis des nuances et des ondulations qu'ils n'ont point d'habitude. Oui, d'habitude un peu raides et filasse. Hervé a naturellement la doyenneté de l'ancienneté. Peut-être savent-ils quelque chose ? Est-ce toujours vrai ? (aujourd'hui, en 2005, en tapant ce texte écrit en 62, je ne me rappelle plus à quoi je voulais faire allusion).
Une bonne pipe clôt le repas. A ce propos on me ressort toutes les pipes de la maison. What a tas ! Ils sont aux petits soins avec moi. Hervé peut rester là où il est ! Mais Mr Fougère, Dominique, vivement encouragé par Denyse son épouse, décide d'aller chercher Hervé. Marie vient avec nous et bien d'autres voudraient en faire autant.
Tout au long de la route nous nous renseignons à droite et à gauche, et ne recueillons des renseignements précis qu'à Laruns. Peu après nous retrouvons Herwick (alias Hervé). Laissant la moto sur place nous décidons de continuer en voiture jusqu'au Caillou de Socques. Quelques photos, quelques grimpettes, réparation des freins de la Deuche qui broutaient (donc freinaient mal) et l'on redescend.
Le soir c'est la fête à nouveau au chalet où nous nous amusons jusqu'à tard dans la nuit..
Hervé et moi dormons dans la salle de séjour, saturée de la fumée des pipes. Qu'importe, je suis heureux d'être ici. Je pense aux autres, et je suis sûr qu'ils pensent à moi. C'est tellement bien que je mets du temps à m'endormir. Et le matin, un petit minet, discrètement glissé dans la pièce par Marie achève de me réveiller en se frottant sur mon nez. Et puis Claire vient chahuter et fait tout pour nous faire sortir des duvets. Heureusement que la gentille et tranquille Odile, la petite dernière si mignonne est là, avec son calme et ses petites histoires. Elle ne s'exprime que par histoires. Ce sera un poëte.
Hervé et moi avons droit à un petit déjeuner particulier, avec la cour des enfants habituelle. C'est tout charmant cette attention bienveillante. Et nouveau pour nous.
Le temps est toujours splendide mais nous avons grand sommeil. Nous traînons et retraînons, savourant la tranquille quiétude du lieu. On joue à la chasse aux photos avec Marie qui ne veut pas se laisser faire, mais qui par contre aime bien photographier les autres. Je vais faire un tour avec la mob de François, en profite pour faire des photos et rencontre Marie sur la route en train d'essayer le nouveau Solex (sorte de mob). Echange de montures, à perte pour moi, car le solex est très lent.
Nous traînons tellement que nous sommes invités une nouvelle fois à manger avec eux. Confortablement étendu au soleil en cette fin décembre si clémente, j'écoute Marie me parler de Raymond Radiguet et de son "Bal du Comte d'Orgel". On dévore Astéryx, on répare Mahaut…. Et il est l'heure de goûter ! Avec eux bien sûr. Enfin, à 5h1/4 nous partons, quand même ! nous partons parce que c’était là le projet initial, mais nous partons avec un peu, beaucoup de regrets, le sentiment un peu confus de lâcher la proie pour l’ombre. Tout le monde est là comme à l'accoutumée pour nous voir dévaler le chemin et disparaître plus bas dans le sous-bois, et cette fois, si possible, plus loin que le cèdre !
La moto cette fois-ci marche très bien, et, après quelques achats à Laruns, nous pouvons foncer vers Aneü. Quelques ratés à cause du carburateur qui se ferme, mais c'est tout. Ce qui nous permet d'arriver à Aneü à une heure correcte. L'auberge du col est allumée, et le groupe électrogène fonctionne. Mais ces salauds refusent de nous héberger. Nous nous contenterons d'une minuscule cahute au bord de la route. Alors que nous préparons la tambouille, la neige se met à tomber. Nous songeons avec mélancolie à la douceur du chalet, à la chaleur des coteaux. Malgré une partie de la nuit passée à claquer des dents, nous n'émergeons finalement qu'à 10h1/2 du matin.
Il faut faire la trace pour monter à Pombie. Le blizzard s'est levé. On trouve le lac gelé. La grande muraille de Pombie se voile et se dévoile tour à tour, enveloppée de brouillard, recouverte de givre. Après une pose au refuge, nous décidons de regagner Arudy, moins hostile, et nous l'atteignons sans encombre à 18 h. Après un gros repas, nous nous roulons dans nos couchages, chacun dans nos rêves, et dormons de 7h1/2 à 11h le lendemain ! 15 heures ! Fallait ça pour récupérer. Malgré tout, nous ne faisons pas grand chose. En allant chercher de l'eau à la ferme d'Anglas, chez le si aimable M. Courrèges, nous découvrons de belles dalles à l'ouest du défilé, et nous les parcourons.
De retour au bivouac du groupe I (Sesto), sur une idée d'Hervé, nous le décorons avec du gui, une plante à boules rouges (phragon), des fleurs parfumées et du houx.
Pourquoi ce rituel ? Ici aussi nous sommes chez nous. Mais il y a comme un vide…


...Entouré d'arbres et de chemins boueux
Il abrite beaucoup d'êtres heureux...(DF)
(Extraits des Bouts Rimés du dimanche 15 avril 1962)

Ces péripéties ont été , à l'époque, retracées de façon plus romantique par la chanson suivante :

François s'en va devant, il s'avance un petit
Avec sa mobylette au grigri de souris...
Et ainsi ils pourront à l'heure être arrivés
Bien loin de tous les hommes, dans leur pays rêvé.
Tenant ferme les rênes, éblouissant Ben Hur
Dessus le réservoir, cravachant sa monture

Hervé coupe le vent
A son grand ami Jean

Et la lourde Mahaut réunissant ses forces
Malgré l'air se heurtant à son profil de morse
Arrive à parvenir à la côte du Mourre
Mais là son gros fardeau lui apparaît trop lourd
Sa démarche se fait tout de suite plus lente
Elle veut reprendre souffle effrayée par la pente.

Ce n'est qu'en la flattant
Qu'elle pousse de l'avant

Et bien tard dans la nuit sous la lune brillante
Dans la neige crissante, sur la glace luisante
Grande consternation ! ils en sont tout surpris
Le François, un petit, au grigri de souris
N'est pas là ! Ca alors !! Ils fouillent pouce à pouce
Les étendues neigeuses. Ho la la quelle frousse !

Mais non il n'est pas là !
... de Dieu, quelle face de rat !

Alors on s'en retourne et dans la nuit profonde
Ils hurlent à leur ami à travers le grand monde.
La voûte des étoiles retentit de leurs cris
Et la clameur immense s'étend à l'infini.
Il est perdu c'est sûr ! que diront ses parents ?
Plus jamais ils n'auront confiance en leurs talents

Ils cherchent, cherchent bien...
Mais ils ne trouvent rien.

Peut-être la chance aidant pourront-ils ramener
A sa famille en pleurs et pour leurs coeurs peinés
Un souvenir chéri de l'être disparu
Comme un enfant perdu au coin de la grand'rue ?
Ici, dans ce ravin, peut-être appelle-t-il ?
Ou la neige l'a pris, par étreinte subtile ?

François où es-tu donc ?
Où que tu sois, réponds !

Que tu sois là au fond, ou bien déjà en haut
Réponds à tes amis – Mais non, rien qu'un corbeau !
Ton souvenir léger les porte sur la glace
Ô toi pour qui leur coeur te laissait tant de place !
Et vlan ! mille étincelles s'échappent de la route,
Eteignant un instant la pâleur de la voûte

Allongée sur le sol
Mahaut fait la fofolle

François, cela est sûr, ne doit pas être en haut
Mais notre sort à nous n'est pas l'un des plus beaux !
Clopin sur le goudron, clopant bien lentement,
Mahaut s'arrête enfin dans un frémissement.
Elle a faim. "Chère enfant, comment te satisfaire ?
On n'a rien à donner à ton ventre de fer".

Achevant leur déroute
Ils courent sur la route

La lune noie les prés d'un éclat nébuleux
Et ils reposent enfin sous le grand cèdre bleu...


Marie, Catherine et Cécile ont ajouté :

Lorsqu'avec leur moto revenant d'Arudy
Livides, échevelés, au milieu de la nuit
Ils se furent couchés au pied d'un grand sapin
Leurs consciences troublées attendant le matin

Par la gamelle ouverte s'échappait leur larcin.





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